A la UneInterviews

[Exclu TF] : Radhi Jaidi à coeur ouvert

Review Overview

User Rating: 4.71 ( 9 votes)

Formé au Stade Gabésien et vainqueur de la CAN 2004 avec la Tunisie, Radhi Jaidi est promis à une future grande carrière d’entraineur. Il parachève sa formation à Southampton dans l’académie des moins de 21 ans après une riche expérience en Angleterre. C’est avec une extrême gentillesse que Radhi nous a accordé une longue interview en exclusivité durant laquelle il revient sur sa carrière et explique certains passages pour la première fois. Nous vous souhaitons une bonne lecture sachant que vous trouverez la même interview en arabe sur son site radhijaidi.com

« Avec l’Espérance on a gagné 7 fois de suite le Championnat…Bolton c’était le meilleur choix footballistique pour moi »

TF : Pouvez-vous résumer votre parcours sportif pour nos plus jeunes lecteurs ?

Radhi Jaidi
Radhi Jaidi à ses débuts avec l’Espérance Sportive de Tunis

RJ : J’avais commencé à jouer au football en 1988 au Stade Gabésien. À cette époque-là, le club était en deuxième ou troisième division. Je venais d’arriver depuis la capitale Tunis suite au décès de mon père. Ma mère ayant décidé de retourner chez sa famille. J’ai découvert le football organisé dans un club au Stade Gabésien. Et c’est là que j’ai commencé à pratiquer sérieusement le football. J’ai découvert le challenge de pouvoir faire partie des 11 titulaires ou le challenge d’être appelé en équipe nationale. J’étais pris, après en 1993, par l’Espérance de Tunis. Je jouais à cette époque avec l’équipe nationale junior et avec les séniors à Gabès à l’âge de 17 ou 18 ans. Le grand challenge a commencé à l’Espérance où j’ai rencontré pratiquement les meilleurs joueurs de la Tunisie à cette époque-là. Il y avait Chokri El Ouaer, Mohammed Ali Mahjoubi, l’ancien défenseur de l’équipe nationale, Taoufik El Hicheri, Ayadi Hamrouni, Tarek Thabet, Khaled Ben Yahia quelques semaines avant la fin de sa carrière. J’ai rencontré certainement la dream-team des jeunes de l’époque. Quand j’ai commencé, c’était difficile de prendre ma place dans l’équipe type. J’ai passé 5 à 6 ans pour devenir titulaire fin 1998, début 1999. J’ai galéré comme on dit. J’ai travaillé dur en étant jeune. Il y avait beaucoup de concurrence et plusieurs défenseurs. Et en tant que jeune venant du sud sans un vrai soutien familial, puisqu’il n’y avait que ma mère, je n’avais pas un soutien parental qui te donne confiance, qui te parle de football et qui te donne des conseils. J’étais seul, je me suis conseillé tout seul. À cette période à l’Espérance, ce n’était pas facile de prendre sa place. Mais une fois que je suis devenu titulaire, c’était plus facile. C’était après la coupe du monde 1998 où j’étais disqualifié à la dernière minute par Henryk Kasperczak. Je ne lui en veux pas parce que je n’étais pas titulaire à l’Espérance et je bataillais pour ma place. Je n’ai pas eu la chance de l’avoir. Mais tout de suite après, la porte s’est ouverte. J’ai pris ma place à l’Espérance, et je commençais à récolter le fruit de mon travail. Je pense que tout le monde connait mon parcours avec l’Espérance, on avait gagné 7 fois de suite le championnat, la coupe de la Tunisie où j’avais marqué un but en finale contre le Club Africain. On avait gagné 2-1 avec le but de Hassen Gabsi. On avait gagné la coupe afro-asiatique, la Coupe de la CAF, la Super Coupe d’Afrique aussi, mais malheureusement nous n’avons pas pu gagner la Champions League Africaine. On a perdu les trois finales, bien sûr la finale célèbre contre le Raja Casablanca. C’était une déception personnelle ainsi que pour les fans tunisiens.

À cette époque-là, mon objectif était de jouer à l’étranger, mais je n’ai pas pu le réaliser à cause de beaucoup d’aspects. Un des aspects est que nous, les joueurs tunisiens, nous n’étions pas bien considérés à l’échelle européenne. On n’avait pas des joueurs qui ont laissé une bonne impression en Europe et le football tunisien était très sous-estimé. Même si on avait quelques joueurs de qualité comme Zoubeir Baya, Adel Sellimi ou Ayadi Hamrouni, mais malheureusement nous n’avions pas été estimés à notre juste valeur parce que ni dans les rendez-vous internationaux tels que les coupes d’Afrique ou coupes du Monde ou encore dans les matchs amicaux face aux grandes nations on ne réussissait pas à concrétiser notre qualité. Ni par rapport aux dirigeants ou par rapport au système qui était très fermé. C’était donc une période très difficile. Le vrai changement a eu lieu lorsque Roger Lemerre est venu en Tunisie. C’est lui qui a changé l’image du football tunisien surtout avec l’équipe nationale et encore plus avec la victoire de la CAN en 2004. C’est lui qui a amené le professionnalisme et la mentalité à suivre. Il a, aussi, amené de l’intérêt des gens. On a répondu tout de suite par la victoire de la Coupe d’Afrique et là ça a ouvert la porte à plusieurs joueurs. J’étais parmi les joueurs qui ont su profiter de l’occasion. Je n’étais pas le meilleur dans cette équipe ni dans cette période. Je me comptais toujours comme un joueur moyen par rapport à ma qualité et ce n’est pas de la fausse modestie. J’étais conscient de ma situation. Je n’étais pas mieux que Khaled Badra par exemple. On se complète les deux. J’en veux à quelques joueurs qui étaient, peut-être, meilleurs que moi, mais qui n’ont pas su profiter de l’occasion. Cette période était la clé de ma carrière et la venue de ma fille Zeïneb, qui a aujourd’hui 12 ans, a été un déclic pour penser à l’avenir de ma fille et faire un choix difficile. Parce que sortir de l’Espérance de cette époque, avec son image, son pouvoir, et ma situation confortable en tant que capitaine de l’équipe n’était pas simple et pourtant j’ai pris cette décision. Ce fut aussi un de mes rêves de joueur en Angleterre. J’avais reçu trois offres, une du Bayer Leverkusen, une du Qatar et une de Bolton. C’était le meilleur choix footballistique pour moi, j’avais raté une offre avec Westham avant, mais c’était le parfait moment pour partir. Beaucoup de gens ont cru que je partais pour l’argent pourtant Bolton étaient les moins-disants, mais j’ai fait ce choix pour m’exprimer footballistiquement.

Voilà donc, je suis parti en Angleterre, une nouvelle vie, un nouveau style de vie, une autre mentalité. J’étais au début surpris, je pensais que ça allait ressembler à l’Europe méditerranéenne qu’on connait, mais c’était différent. Et puis ça m’avait aussi surpris de devenir presque anonyme. On m’avait présenté comme l’international tunisien qui a gagné la coupe d’Afrique et c’est tout. Très différent de ce qu’on avait l’habitude de voir en Tunisie avec les gros titres, les articles tapants, etc. C’était donc un nouveau challenge pour moi pour confirmer que j’étais un joueur de valeur et que le fait de venir de Tunisie ne leur permettait pas de me sous-estimer. Au bout de 6 mois, j’ai confirmé avec Bolton en devant le meilleur joueur, choisi dans l’équipe de l’année. J’ai marqué des buts contre les grandes équipes. C’était le summum de ma carrière.

TF : Vous avez passé 11 ans à l’Espérance et un peu moins en Angleterre, quelles étaient les différences qui vous ont le plus marquées ?

RJ : Franchement, ce que je vais dire peut paraitre bizarre, mais c’est ce qui s’est réellement passé dans ma tête. Quand je suis parti en Angleterre, j’ai trouvé la vie facile pour les joueurs. On a l’impression d’être dans un Paradis comparé à ce qu’on a vécu. Nous, en Tunisie, le joueur galère. En semaine, il galère à l’entrainement, et le weekend il joue contre l’adversaire, le public de l’adversaire, son public, l’arbitre et le terrain même si pour moi c’était un peu différent en étant à l’Espérance. La pelouse était catastrophique et très difficile. Je me suis dit : si j’ai réussi à me distinguer en Tunisie, qu’est-ce qui peut m’en empêcher avec ces terrains, avec toute cette infrastructure, et la mentalité des fans qui est extraordinaire même en cas de défaite. C’est tout une autre mentalité et un autre monde. Après, à n’importe quel échelon les gens sont sérieux dans leur travail, ils sont compétents, ils se respectent. Tout ça m’a encouragé à jouer jusqu’à 37 ans. J’aurais pu arrêter le football en Tunisie à l’âge de 31 ans avec des blessures graves. On est trop loin de ce niveau, ni dans la gestion, ni surtout dans la mentalité parce qu’en Tunisie la mentalité sportive régresse. Ça m’avait aidé de passer par l’Espérance, un grand club avec des déplacements dans différents pays et des expériences variées et de jouer contre de grandes équipes. Ça m’a aguerri, ça m’a donné de la confiance. En Afrique c’était difficile, on jouait toutes les deux semaines dans des conditions misérables.

TF : Vous avez gagné tous les trophées avec l’Espérance et la CAN en 2004 avec la Tunisie. En dehors de la CAN quel était votre meilleur trophée gagné ? Et pourquoi ?

RJ : Honnêtement, je n’ai pas de réponse claire à cette question. Même quand on avait gagné les championnats 7 fois de suite il y avait un gout différent. Mais c’est probablement l’année où nous avons rattrapé l’Étoile Sportive du Sahel, pour les dépasser après dix points de retard, qui est la plus marquante. C’était après le retour de Chokri El Ouaer et Khaled Badra.  J’avais senti que cette période sans concurrence était ennuyeuse pour le public, même les fans n’étaient pas très enthousiastes. Quand j’étais parti de l’Espérance, j’ai vu qu’ils avaient quelques difficultés mais le public était là, le stade était plein. Je me suis dit pourquoi, nous, quand on gagnait chaque semaine ils n’étaient pas là. Et franchement, quand je me mets à leur place, c’est vrai que c’est un peu ennuyeux quand tu sais que l’équipe va gagner contre les autres équipes et qu’il n’y a pas de suspens. Certains pensaient que Slim Chiboub y était pour quelques chose, mais en réalité nous avions la meilleure équipe et la preuve en est que nous faisions toujours un excellent parcours en Afrique ou quand on rencontrait de grandes équipes européennes en amical. Mais, en tant que joueur, j’étais toujours impliqué. J’avais l’ambition de me donner à fond. Je ne jouais pas que pour gagner, mais aussi pour mon avenir, pour ma famille, pour mon bonus, etc.

Pour moi, toute la période que j’ai passée à l’Espérance était un trophée pour moi. Ce n’était pas facile de partir à l’étranger dans notre période ni de sortir de l’Espérance.

TF : Quel est votre meilleur souvenir avec l’EST ?

RJ : La période que j’ai passée à l’Espérance et les 7 championnats de suite ainsi que la coupe où j’étais en réussite.

TF : Et votre pire souvenir ?

RJ : Le pire c’est la finale perdue face au Raja même s’il y a pire que ça. Quand tu vois ton coéquipier mourir à côté de toi, c’était terrible. Je n’ai pas pu dormir pendant une semaine. Je n’avais pas le courage de rejouer au foot. J’avais aussi peur parce qu’on ne savait pas ce qui s’est passé. Assurément, mon pire souvenir est la finale de Raja et la mort de Berkhissa Allah yarhmou. On jouait un match amical au Zouiten face à Lyon, il était à côté de moi. C’était un choc.

« Arsène Wenger me voulait mais il était déçu par mon age »

TF : Vous l’avez dit tout à l’heure, mais est-ce que votre passage à Bolton était le summum de votre carrière ?

Radhi Jaidi
Radhi Jaidi célébrant son but

RJ : Juste un détail pour éclaircir. Quand je suis parti en Angleterre, j’étais déjà dans la courbe qui commençait à s’inverser. J’avais 28 ans. La courbe n’est plus ascendante par rapport à ma carrière. Si j’étais parti à l’âge de 22 ans peut être qu’un an après j’aurais pu signer un contrat à Arsenal. Parce qu’Arsène Wenger me demandait quel était mon âge et pourquoi j’ai passé beaucoup de temps en Tunisie et pourquoi je n’étais pas venu plus jeune. Je lui avais expliqué un peu les conditions. Sam Allardyce me disait qu’Arsène voulait te voler, mais quand il a su ton âge il était un peu déçu. Je sais m’expliquer mon parcours, mais les gens ne le savent pas ou ne le comprennent pas. Mon passage à Bolton, c’était le top ; c’est sûr. Mais c’était déjà le début de la fin de ma carrière.

J’étais déjà chanceux de commencer avec le Stade Gabésien qui m’a pris sous ses ailes. Mais la formation en Tunisie est une formation ordinaire. Elle n’était pas riche, ou professionnelle à cette époque. Aussi, à l’Espérance, ma première année avec Faouzi Benzarti était dure. Il n’utilisait pas les sciences du sport, il nous faisait courir partout. C’était un peu à l’intuition même s’il a réussi à m’intégrer dans le groupe. Je ne dis pas que quelques formateurs ne sont pas compétents, mais c’était le standard de développement tunisien qui est en dessous du moyen. C’est un standard qui ne m’a pas permis de me développer quand j’étais jeune. J’ai dû attendre pour arracher ma place et confirmer et dès que je l’ai fait je suis parti en Angleterre à l’âge de 28 ans. Même avec ça j’ai pu réussir en Angleterre et faire un peu parler de moi.

TF : Quel est votre meilleur moment avec les Wanderers ?

RJ : C’était probablement la deuxième année quand on s’est qualifié pour l’Europa League. Je faisais partie de cet effectif et j’ai beaucoup participé à cet accomplissement. C’était une très bonne période avec des joueurs de haut niveau. Que ça soit des anglais ou des étrangers. Comme Okocha, El hadji Diouf, Nakata, etc. On avait une quinzaine de nationalités et l’ambiance était phénoménale. Ça m’a donné des ailes et m’a fait aimer encore plus le football. Et la Premier League a un gout « Hlou » (NDLR : doux).

TF : Ce n’était pas cette année-là que vous avez marqué face à Arsenal ?

RJ : Non, c’était la première année. C’était mon deuxième but. Mon premier match je l’ai joué face à Southampton. J’étais élu meilleur joueur. Après on a battu Liverpool pour la première fois. Et après la série était belle, je marquais presque chaque semaine. En tout, j’ai marqué huit buts les premiers mois et tous ont été contre de grands clubs : Arsenal, Chelsea, Liverpool, Tottenham, etc. Je ne sais pas ce qui s’est passé, mais j’avais de la réussite.

TF : Avec une telle visibilité pour un joueur tunisien est-ce que vous avez reçu du soutien des clubs et dirigeants tunisiens ?

RJ : Bien sûr. Quand tu marques, il y a tout le monde qui t’appelle. Tout le monde veut être ton ami ou faire partie de ton succès. Et je le comprends.

TF : Et en dehors de ces buts-là, vous ont-ils suivi et soutenu quand vous ne marquez plus ?

RJ : Je pense que vous connaissez la réponse. Quand tu ne marques pas ou quand tu ne joues pas, personne ne t’appelle. C’est ça, et ce n’est pas lié qu’au football, quand tu as du succès tout le monde veut être ton ami et quand tu as des passages à vide il faut que tu aies une assurance. Je conseille les jeunes de faire attention et de bien s’entourer en choisissant des amis sur qui ils peuvent compter en cas de passage à vide.

Le jour où j’avais du succès, tout le monde me félicitait. Je me rappelle, il y avait des gens qui ont acheté la parabole pour pouvoir suivre mes matchs. C’était un succès et je suis fier d’avoir représenté la Tunisie sur l’échelle internationale. J’ai reçu beaucoup de coups de fil. Des présidents de clubs, des joueurs, etc. J’en suis fier et content.

« Je suis parti là où on me voulait »

TF : En fin de carrière, vous avez fait le choix de rejoindre d’abord Birmingham en deuxième division puis Southampton FC qui était en division 3, pourquoi un tel choix ?

Radhi Jaidi
Radhi Jaidi avec Southampton

RJ : Je n’en ai jamais parlé, mais ce qui s’est passé c’est qu’avant la coupe du monde 2006 Sam Allardyce ne m’avait pas fait jouer beaucoup de matchs. Il alternait entre les autres joueurs et moi à tour de rôle. Ça se passait entre moi, le français Bruno Ngotti et le jeune israélien Tal Benaim. Lorsque je me suis blessé à la fin de la première année, Bruno Ngotti avait pris la place et Tal était ambitieux et travailleur, mais n’avait pas pu prendre la place quand j’avais du succès. Il n’avait aucune chance, mais le jour où je me suis blessé il a bien saisi sa chance et l’a bien fait en confirmant que c’était un bon jeune joueur prometteur. Donc Sam Allardyce, la deuxième année avait pris la décision de le faire jouer plus. Quand il a pris sa décision, il avait en tête que Bruno et moi étions dans une pente descendante dans notre carrière. Il a basé son choix sur l’âge et a parié sur l’avenir. Je n’ai pas aimé ça, je lui ai dit qu’il fallait que je sois en forme pour la coupe du Monde. Il m’a dit que c’était son choix, j’ai donc demandé de partir du club et ça a été accepté. À cette période, Steve Bruce, qui est à Hull City maintenant, m’avait demandé de faire partie de son équipe de Birmingham pour remonter en Premier League. J’ai accepté le challenge qui m’amenait en Championship certes, mais ça confirme ma maturité et mon expérience. Je l’ai fait, je suis parti à Birmingham et on est revenu en Premier League. C’était un double succès. Mais, les Tunisiens l’ont pris négativement, mais comme je l’avais dit plus haut j’étais conscient de ma carrière, j’avais perdu le challenge face à l’Israélien et je le perdrais toujours si j’étais resté à Bolton étant donné nos différences d’âge, d’autant plus qu’il avait tapé dans l’œil de l’entraineur et qu’il voulait capitaliser sur sa revente. J’ai pris en considération ce fait et je suis parti là où on me voulait. Et je pense que c’était le meilleur choix.

Ça m’a permis de rester en Angleterre parce que probablement en restant avec Bolton j’aurais fait un an ou deux puis rentrer en Tunisie.

Je suis resté trois ans à Birmingham. On était bien installé avec ma femme et mes enfants. Ils ont bien aimé la ville. Je n’étais pas très convaincu par l’ambiance du club surtout en comparaison avec Bolton, mais je suis resté pour ma famille. Et puis il y avait une option de 4e année que Birmingham a fait le choix de ne pas l’utiliser. Je les avais aidés à revenir en Premier League et McLeish me disait que j’avais 33 ans et avait peur que je me blesse. J’étais pourtant le seul joueur à ne pas m’être blessé et je n’en ai pas profité pour les faire signer ; j’étais correct. Je ne savais toutefois pas ce que j’allais faire. Soit, je faisais comme tout le monde et je partais au Qatar pour amasser un peu d’argent, soit je restais en Angleterre pour avoir encore plus d’expérience. À cette époque, j’avais reçu un coup de fil d’Alan Pardew, l’entraineur de Southampton qui me connaissait depuis la Premier League. Il m’a proposé de venir à Southampton comme joueur d’expérience. Il était en train de construire une équipe pour revenir en Premier League. J’ai accepté le rendez-vous et après quand j’ai parlé avec le président du club il m’a vraiment convaincu. Le projet était clair et très intéressant. Peut-être que le fait d’avoir joué mon premier match en Angleterre contre Southampton m’a aussi aidé à faire le choix. Je n’oublierais jamais mon premier match. C’était ici, à St Mary’ s, mon premier match et meilleur joueur. Un match référence pour moi. C’était bizarre de voir cette équipe en troisième division. Donc j’ai accepté le fait d’être un ancien joueur, à 33 ans c’était la fin de ma carrière aussi. J’étais conscient que je devais aider les jeunes à monter la montagne ensemble et faire revenir le club à son niveau. Et depuis, j’ai bien cru à ça et passé le message aux joueurs dans les vestiaires et à l’extérieur et on est revenu en Premier League.

TF : Vous avez arrêté juste avant de démarrer la saison en Premier League.

RJ : Oui malheureusement j’ai signé un contrat de deux ans avec le club. Ils m’ont prolongé d’une autre année suite à l’importance de mon rôle dans le club. L’entraineur ne m’a pas beaucoup utilisé suite à ma blessure, mais il était très convaincu comme étant un pilier d’expérience et qui aide les joueurs à progresser. Et ça, c’était un objectif pour moi et un message pour les gens qui me suivent que je suis en train de me préparer pour ma reconversion.

« Mon objectif c’est devenir entraineur d’élite…Mon projet c’est d’être manager des séniors »

TF : Justement, Southampton vous a confié le rôle de développement en Afrique. L’idée était de faire venir des joueurs africains qui partaient majoritairement en France. Quel rôle avez-vous joué réellement et quels objectifs ont été atteints ?

RJ : L’ancien président avant de partir voulait s’engager dans un projet en Nord Afrique. Un projet d’une académie qui représente Southampton en Afrique avec toute la philosophie du club. On est parti en Tunisie, je l’ai aidé, j’étais en contact avec l’ancien ministre Tarek Dhiab qui nous a aidé avec quelques idées, mais ça n’a pas abouti parce que Southampton n’étaient pas encore prêts à se développer à l’échelle internationale. On était nouveau en Premier League. On voulait d’abord se maintenir. Ce n’est pas Manchester, on n’est pas un club installé pour aller en Afrique ou en Asie. C’était un peu tôt par rapport à nos ambitions mais le projet reste entier. Ça m’a donné l’opportunité de travailler dans l’académie de Southampton qui est très connue qui est parmi les meilleures en Angleterre.

TF : Vous êtes depuis entrainement adjoint des U21 de Southampton. Vous faites un excellent parcours cette année puisque vous êtes deuxième après avoir été en tête. Comment êtes-vous arrivé à ce poste ?

RJ : Je représente encore le volet international, mais je suis plus concentré sur ma formation du management et du coaching avec le club, avec l’académie et aussi les moins de 21 ans et avec le directeur technique Martin Hunter.

TF : Quel est votre objectif dans les années à venir au sein de Southampton ?

RJ : Mon objectif c’est devenir entraineur d’élite. Mon proche objectif c’est de prendre les rênes des moins de 21 ans comme entraineur principal. Et aussi d’aider le club à faire quelques projets à l’échelle internationale et particulièrement en Afrique. Mon projet à long terme c’est d’être un manager des séniors et entrainer des équipes pros en Angleterre.

TF : Avez-vous des points d’échange avec Ronald Koeman qui lui aussi fait un beau parcours avec l’équipe première ? Quelle est la nature de votre relation avec lui ?

RJ : J’ai des contacts tous les jours avec lui. C’est une relation très proche puisque la philosophie du club encourage la proximité des séniors et des moins de 21 ans. On a des joueurs qui s’entrainent avec les séniors. Que ça soit moi qui dois aller superviser nos jeunes avec eux ou bien le staff des séniors qui vient regarder nos matchs. On est en communication continue. Il nous donne ses conseils et on lui donne nos conseils sur les jeunes qu’on leur envoie. Je suis en train d’apprendre de lui, je parachève ainsi ma formation. Je suis heureux d’avoir une relation proche avec les entraineurs de l’élite comme Mauricio Pochettino l’an dernier et cette année Ronald Koeman.

TF : Comment vous voyez-vous dans 5 ans, dans 10 ans ?

RJ : Je me vois un entraineur d’élite au haut niveau. C’est ça mon objectif.

TF : Espérez-vous entrainer un jour la Tunisie ?

RJ : Bien sûr. Si la Tunisie me demande, je ne dirais jamais non. La Tunisie c’est mon pays, si elle a besoin de moi je serais au rendez-vous. Mais il faudra me suivre, parce qu’en acceptant un tel rôle j’amènerais une mentalité et une philosophie pour passer au haut niveau.

TF : Et l’Espérance ?

RJ : Aussi, aussi, peut-être l’Espérance me demande avant la Tunisie (sourire). C’est mon club de cœur sans oublier le club Gabésien. Ils m’en veulent de ne pas les avoir cités. Moi je dis que la Stade Gabésien est toujours dans mon cœur même si c’était une période passagère et rapide, mais sans cette période je ne serais pas devenu ce que je suis aujourd’hui. Ce n’est pas une excuse, mais ils ne m’ont jamais invité ni par un dirigeant ni par quelqu’un de Gabès. Les entraineurs et les présidents qui changent, moi je ne les connais pas. Il faut que ça soit organisé et si jamais j’envoie de l’argent je ne sais pas à qui l’envoyer ni où ça va aller. Je n’avais pas voulu parler, mais Gabès, l’Espérance, la Tunisie, ça fait partie de moi.

TF : Vous êtes un des anciens joueurs tunisiens les plus actifs sur les réseaux sociaux, vous êtes présent sur Facebook, Twitter, Instagram et commentez l’actualité sportive de votre équipe et de l’équipe nationale de Tunisie. On peut dire que vous êtes un joueur connecté, contrairement à vos collègues de la même génération, est-ce une passion ?

RJ : J’étais un peu différent des autres joueurs, j’étais toujours à jour notamment dans les années 90. J’étais toujours avec ma caméra, je suis toujours l’activité électronique. J’ai un côté geek.

À la base, je ne voulais pas faire la même faute que mes anciens collègues. Je pense qu’ils ont fait des erreurs par rapport à leur image en s’absentant de la scène sportive et ne pas faire profiter de leur expérience et leurs idées. Moi j’ai voulu profiter de la situation pour toujours donner des news, peut-être aussi que je me sens loin de la Tunisie et que je veux informer les gens qui me suivent. Je donne mon avis sur des problèmes, sur des évènements, je veux être toujours à la page.

TF : Vous n’avez pas fini par ouvrir un café comme les autres ?

RJ : Oui, jusqu’à maintenant je n’ai pas de Bizness. Je ne vies que pour le foot. J’ai des idées, mais je pense que je ne peux pas les faire. Je dois être valable pour ça. Je suis toujours concentré sur le foot et je donne ma vie au foot. Je fais quelque chose que je connais et essaye d’atteindre le haut niveau plutôt que de faire des choses que je ne connais pas et les faire mal.

TF : Votre site radhijaidi.com est lui aussi très actif puisque vous avez des interviews très intéressantes de différents acteurs du football tunisien (Lemerre, Néji Jouini, etc.). Quelle est votre ambition pour le site ?

RJ : Depuis que j’étais à Bolton, je voulais faire ce site qui me représente. Au début, je voulais faire comme tout le monde un site classique de joueur. J’ai changé d’avis pour faire un site qui reflète ma mentalité, comment je pense, qui sont les personnes qui m’intéressent, quelle est ma vie. J’ai beaucoup d’idées. Pour le moment, c’est juste un début en commençant par des interviews. Quelqu’un comme Roger Lemerre, il a vécu avec l’équipe de France puis une grande période avec nous. L’idée de l’interviewer, je pense que c’est une bonne idée et effectivement ces paroles dans l’interview sont intéressantes et transparentes puisqu’il aime beaucoup la Tunisie. Il apprécie le pays. Il a dit pas mal de choses véridiques par rapport à l’équipe nationale, l’environnement des joueurs.

Je voulais aussi faire une petite investigation par rapport à l’arbitrage en Afrique et en Tunisie. J’ai contacté Neji Jouini qui est un homme honnête et transparent qui a réussi à l’étranger et il peut à mon avis aider la Tunisie. J’ai vu qu’on galère dans l’arbitrage. C’est pour ça que je l’ai contacté. Malheureusement, il n’a pas pu nous éclaircir sur les sujets en Tunisie, mais plutôt en Afrique.

Nous, en Tunisie, nous avons un gros problème avec ceux qui dirigent le football. Ils travaillent pour leurs propres intérêts et non pas ceux du football tunisien. Et même s’ils veulent faire progresser le football tunisien, ils manquent de compétences.

L’objectif du site c’est donc de faire des petites interviews, donner mon avis, d’autres parties vont arriver.

« La seule chose qu’on avait avant c’était le Glaieb »

TF : Comment avez-vous trouvé le rendement de l’équipe nationale en CAN ?

Radhi Jaidi
Radhi Jaidi avec la Coupe d’Afrique 2004

RJ : C’était un rendement moyen. Si tu vois les qualités des joueurs que nous avons, on aurait pu faire mieux que ça. Ce n’est ni l’entraineur qui pose problème ni le schéma tactique. C’est la mentalité des joueurs. Moi ça m’a rendu énormément malheureux quand j’ai vu le comportement de nos joueurs quand l’arbitre a sifflé le pénalty. Ça arrive quand même. Tout le monde a jeté la responsabilité de la défaite de la Tunisie sur l’arbitre. Même s’il avait donné un pénalty à la dernière minute. Il restait 30 minutes, pourquoi ne pas se concentrer et donner plus pour gagner le match et pour montrer qu’on est une équipe qui veut faire quelque chose dans cette coupe d’Afrique ? Ça m’a rendu malheureux, tous les joueurs sans exception. Même l’entraineur avant le match parlait de l’arbitre. Moi en tant que coach professionnel je ne donnerais pas l’opportunité aux joueurs de penser à l’arbitre. Il faut dire aux joueurs de se concentrer sur l’objectif du match et ne pas calculer l’arbitre même s’il est pour l’autre équipe. On connait tous l’arbitrage en Afrique. Il faut faire avec. Avec ces joueurs, on aurait pu passer ce match avec une réaction plus positive et plus forte que celle-là. Il y a aussi un côté tactique. On a joué face à une équipe moyenne et en menant 1-0 on jouait à 7 derrière. C’est un peu malheureux parce que sur ce plan-là les gens nous ont moqués un peu. Comment n’a-t-on pas pu exploiter nos ailiers qui sont plus offensifs ? Comment n’a-t-on pas pu gérer notre défense à 4 et donner à chacun la responsabilité pour se surpasser ?

Avant on a été en CAN avec des équipes plus faibles que celle-ci et on a été loin même en 1/2 finale. En 2000, notre équipe était bien plus faible et on est arrivé en 1/2 en perdant contre le Cameroun parce qu’ils étaient plus forts que nous et on ne pouvait pas aller plus loin. Il y avait certes du beau monde, mais on n’avait pas des professionnels comme les joueurs d’aujourd’hui, il n’y avait pas des jeunes motivés comme aujourd’hui. La seule chose qu’on avait avant c’était le « Glaieb ». On se surpassait, on jouait notre vie et pas un match, comme si c’était la fin du monde. C’est ce qui fait la différence.

TF : Avec quels joueurs ou acteurs du football avez-vous gardé contact ?

RJ : J’appelle toujours, mais on ne me rappelle pas. Quand je regarde une ancienne vidéo je cherche les numéros des joueurs et je les appelle. Après en étant engagé avec une équipe avec la famille je suis aussi un peu occupé. J’appelle Jawhar Mnari, de temps en temps Ali Zitouni, Houcine Ragued maintenant, parfois Khaled Badra. J’ai essayé plusieurs fois Chihi, Hakim Nouira. Il y a aussi Tarek Thabet qui me donne souvent son numéro. Beaucoup de joueurs, Khaled Fadhel, Mhadhebi. Ce sont des gens avec qui j’ai vécu pas mal de choses et j’ai beaucoup de souvenirs. Mon devoir est de les appeler d’avoir de leur nouvelle, mais c’est rare que quelqu’un m’appelle.

« Sassi et Ben Youssef étaient gâtés en Tunisie, la vérité des choses ils vont la découvrir en Europe…En Tunisie, quand tu marques un but contre le Club Africain ou l’Espérance tu es gâté »

TF : Quelles sont les valeurs montantes tunisiennes selon vous ?

RJ : En Tunisie on a pas mal de qualités surtout les jeunes joueurs mais on ne s’occupe pas bien d’eux. On a quelques joueurs prometteurs, mais on fait toujours la même erreur avec eux. Pour moi, les néo-Messins Ferjani Sassi et Fakhreddine Ben Youssef sont des projets de bons joueurs. Il faut les laisser travailler discrètement. La vérité des choses ils vont la découvrir en Europe. Parce qu’ils étaient gâtés en Tunisie. Tout le monde parle d’eux, meilleurs joueurs du championnat, etc. Mais ce ne sont que des illusions, en France ils vont leur dire la vérité en face. On est spécialiste dans l’irrégularité. Et le pire c’est que ce n’est pas la faute du joueur, mais du système. En Tunisie quand tu marques un but contre le Club Africain ou l’Espérance, ça y est, tu peux avoir l’argent, la maison, la copine partout où tu vas. Tu es gâté, alors que tu n’as brillé qu’un match, tu n’as pas confirmé en équipe nationale et encore moins à l’échelle internationale. Tu commences à te la raconter et quand tu vas en Europe tu découvres la vérité. Au lieu de travailler et de te surpasser, tu baisses les bras. Ça explique pourquoi beaucoup de joueurs qui sont partis en Europe reviennent. Ils cherchent les chemins les plus faciles.

Le problème de la Tunisie n’est pas les joueurs, mais la pelouse, l’infrastructure, la mentalité, la direction, etc. Depuis les clubs jusqu’en équipe nationale on n’a jamais réussi à faire un plan à long terme clair avec des objectifs clairs pour le football. Depuis que je joue au football, je n’ai jamais vu un plan comme ça. En 2015, la Tunisie continue de raisonner tournoi par tournoi, on va préparer la prochaine CAN, des fois on change d’entraineur, des fois c’est le président. On le remplace et on recommence. Comme nous, en 2004, on aurait dû construire avec l’équipe, le staff et la direction qui a gagné la CAN et qui s’est qualifiée en coupe du Monde en 2006. On aurait dû préparer un projet à long terme. On est revenu au point de départ.

TF : Du coup pensez-vous que la Tunisie peut retrouver le niveau que vous avez vécu et laissé jusqu’à 2004 ?

RJ : Certainement, mais ça prendra du temps parce que nous arrivons au bout d’un certain moment à faire un coup d’éclat. C’est une question que je me pose aussi et à laquelle je n’ai pas trouvé de réponse. Je ne sais pas si on doit réparer la base footballistique. Notre base est trop ancienne. Elle était, peut-être, valable dans les années 70, maintenant il faut la renouveler. Sans exagérer, je me pose tous les jours cette question : c’est quoi le problème de la Tunisie. Il y a beaucoup de facteurs. En dehors des facteurs que j’ai cités plus haut il y a aussi les médias commerciaux, qui désinforment les gens. Un jour, ils sont avec toi, et l’autre jour contre toi en fonction de leurs intérêts ou ceux de leur commanditaire. Ces médias faussent la situation juste avant les compétitions et les gens les croient et en font des rêvent et quand on perd la déception est alors encore plus grande. On est trop sentimentaux comme public et on réfléchit peu, ce qui fait que la déception est trop grande et les réactions trop fortes et exagérées. Ça ne laisse pas les gens travailler au sein des directions et même les joueurs. Il faut former des gens professionnels dans les médias, dans les directions techniques, qui travaillent à long terme et il faut les superviser par d’autres compétences pour corriger et avoir deux départements qui se supervisent et qui peuvent travailler sur le long terme. En tant que fédération, tu dois définir un plan et superviser les gens en leur laissant les moyens et le temps. Moi j’ai un exemple concret que j’ai vécu à l’âge de 13 ou 14 ans. On était dans un tournoi en Italie avec l’équipe nationale cadette. Nous avons battu le Japon avec un gros score 6 ou 8-0. On a battu l’Angleterre 2-1 et perdu 2-1 face à l’Italie. Les Japonais, eux, ont perdu en plus 11-0 face à l’Italie et 6 ou 7 face à l’Angleterre. À la fin de la réception, leur entraineur avait fait une réception avec des cadeaux, ils étaient contents et nous avaient invités. Nous, on rigolait. On leur a dit pourquoi vous célébrer vos grosses défaites. L’entraineur nous a dit qu’ils préparaient la coupe du monde 10 ans après. Notre objectif c’est 2002 et nous sommes contents du rendement de nos jeunes. Eh bien, 10 ans après on a joué contre le Japon et on a perdu contre eux en Coupe du Monde et probablement 60% de cette équipe. Tout de suite après ce match, je me suis posé la question : pourquoi en seulement 10 ans ils ont formé une équipe qui est allée en 1/4 de finale de la coupe du monde alors que nous, on sort dès le premier tour ? Nous, en 50 ans, on répète les mêmes erreurs.

TF : Avez-vous des regrets dans votre carrière ?

RJ : Peut-être que j’en ai. Des fois je mens à moi-même pour ne pas me fâcher (rire). J’ai certainement fait des erreurs, mais je suis content du parcours que j’ai fait et je suis en train d’apprécier ma carrière de coach maintenant.

TF : Avez-vous senti une injustice ou un manque de considération à la fin de votre carrière internationale avec la Tunisie ?

RJ : Je n’étais pas surpris, après la coupe du monde 2006 je voulais terminer et j’ai annoncé ma retraite parce que j’ai vu la fin de ma carrière. J’avais l’ambition de jouer encore, mais c’était une déception individuelle et collective parce qu’on avait les moyens de faire quelque chose et j’étais déçu de ma propre performance et la performance collective. Je me suis donc arrêté pour donner une chance aux jeunes de se préparer aux nouvelles échéances et c’était aussi à la fois une sorte d’auto punition et de pouvoir aussi prendre le temps pour ma famille. Mais quand Nabil Maaloul m’a demandé de revenir, je n’ai pas pu dire non. Je suis revenu comme organisateur plus que joueur. J’étais conscient de mon travail comme capitaine. On a réussi à nous qualifier en CAN 2008 et en cours de qualification en Coupe du Monde, Humberto Coelho est arrivé et Roger Lemerre était parti. Moi de mon côté j’étais dans une période sans club après Birmingham jusqu’à la dernière minute. Il m’avait dit qu’il allait me convoquer. Il ne l’a pas fait, c’était fini là-bas. J’étais conscient que l’équipe nationale n’avait plus besoin de moi. C’était une séparation à l’amiable comme on dit.

C’est aussi notre spécialité en Tunisie. Quand le joueur est en forme, ça va, mais quand on n’a pas besoin de lui on ne l’appelle pas, mais ce qui fait mal c’est que tu entends des choses pas très agréables. On ne te dit pas : voilà, tu as fait du bon boulot, maintenant bonne chance pour ta fin de carrière. Moi j’en veux à ceux qui dirigent le foot et non pas à ceux qui le suivent. Mais bon, je ne suis pas le seul, tous les joueurs en fin de carrière ont vécu ça. Moi j’étais prêt depuis 2006, j’ai eu de la chance de faire deux ans de plus.

TF : Dans un monde parfait, si la Tunisie avait les moyens, qui pourrait être le meilleur entraineur pour la Tunisie ?

RJ : La Tunisie a besoin d’un professeur dans le football. Quelqu’un qui connait tous les niveaux. Malheureusement, on n’a pas pu créer un professeur même si nous avons quelques-uns qui connaissent très bien le football que les autres pays utilisent, mais pas nous. On a besoin de ce caractère pour le prendre comme un leadeur et les autres personnes compétentes qui ont connu le haut niveau le suivent. Quelqu’un comme Arsène Wenger qui avec Arsenal a une confiance depuis des années et qui les a fait franchir pas mal de paliers.

TF : Pensez-vous que la sélection nationale est bien gérée aujourd’hui ?

RJ : Bien sûr que non. On a un vrai problème de gestion et de direction. Notre système est à revoir et doit être mis à jour et clarifié. Je ne pense pas qu’il soit bien géré.

TF : Sans citer de noms, pensez-vous que certains joueurs de l’Équipe nationale sont surcotés actuellement ?

RJ : C’est sûr qu’il y’en a. Ils doivent penser valoir plus que leur valeur réelle. Il y a des joueurs qui n’ont rien fait. Ils ont fait quelques matchs, ont marqué un but en équipe nationale et les médias en parlent comme s’ils avaient marqué le football mondial. Et ça les dessert.

TF : Pensez-vous que les jeunes Tunisiens choisissent le football pour le sport ou pour le star-système ?

RJ : Ça dépend de la situation du jeune ou des parents. Généralement, on dit que les joueurs ont un background de pauvre ou de classe moyenne. Maintenant, les jeunes sont impressionnés par Messi ou Ronaldo et rentrent dans le domaine du football. D’autres souhaitent rentrer dans le domaine comme un projet financier.

TF : Un peu d’humour, pensez-vous que les joueurs d’aujourd’hui sont plus préoccupés par leur style de mode ou de cheveux plutôt que leur style de jeu ?

RJ : Je ne me souviens pas me regarder dans une glace avant le match. Je suis plutôt concentré et je réfléchis à beaucoup de choses concernant l’adversaire, le match. Je suis plutôt préoccupé par ce qui va passer sur le terrain. Bref, tout ça, c’est à cause de Ronaldo (rire)

Sauf que nos joueurs ne voient pas combien Ronaldo travaille à côté. Ils regardent juste sa coupe de cheveux, ses chaussures…

TF : Un dernier mot pour nos TFistes ?

RJ : J’espère que j’ai clarifié quelques points de ma carrière puisque c’est la première fois que j’en parle. Inchallah que je reste toujours à la hauteur en représentant bien la Tunisie. Je ne pense pas qu’à moi. Et j’espère vous donner mon avis sur votre site ou au travers du mien.

J’espère que vous allez me suivre sur mon nouveau site. Donnez-nous vos commentaires pour améliorer son contenu.

TF : Merci pour votre gentillesse et disponibilité.

Majed

Passionné de football depuis mon jeune age, je suivais mes deux équipes favorites, l'Espérance Sportive de Zarzis et le Club Africain que j'ai découvert à l'époque des Lotfi Mhaissi, Hédi Bayari, Kamel Chebli et Lassaad Abdelli. J'ai réellement rejoint Internet en 1994 en étant à l'ENSAM pour ensuite gérer le forum du CA en 1996 puis plusieurs sites personnels dédiés au CA et à l'ESZ. J'ai fondé Tunisie-Foot.com en 1998 au travers d'un site traitant du football tunisien qui aura son nom de domaine et son serveur dédié en 2000.
Bouton retour en haut de la page