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[U20] : Bilan contrasté pour la Tunisie

Un mois après l’élimination des Aiglons, la rédaction de Tunisie-Foot vous propose un bilan de la Coupe du Monde U20 de la Tunisie qui s’est déroulé en Argentine. Un parcours qui aura été marqué par la qualification historique des hommes de Montassar Louhichi en 1/8e de finale, après celle de la Tunisie U17 acquise en Corée du Sud en 2007, avant de chuter face au Brésil. Nous avons analysé les aspects tactiques et physiologiques qui n’ont pas fonctionné et souhaitons vous apporter quelques pistes d’amélioration.

La Tunisie U20 s’est retrouvée dans un contexte tumultueux marqué par le limogeage du sélectionneur Adel Sellemi malgré une qualification historique pour la Coupe du Monde. Cette éviction, due à de mauvais résultats et à des tensions avec une partie du vestiaire, a fragilisé la position de l’ancien entraîneur du Club Africain et a précipité son départ le 23 mars. Il a été remplacé par Montassar Louhichi seulement deux mois avant le début de la Coupe du Monde U20, laissant ainsi peu de temps au nouveau sélectionneur pour se familiariser avec l’équipe et préparer la compétition. Dans ces circonstances imprévues et précipitées, la sélection tunisienne n’a disputé que deux matchs amicaux. Le premier s’est soldé par un match nul 0-0 contre l’Olympique de Béja, et le second a vu les hommes de Louhichi remporter une large victoire de 5-1 contre les Cavaliers du Sud de Ben Guerdane. Cependant, il convient de noter que les deux équipes étaient engagées dans les phases finales du championnat tunisien, ce qui signifie que les compositions d’équipes étaient considérablement modifiées et que les résultats ne permettent pas une évaluation objective de la valeur de cette préparation. De plus, la Fédération Tunisienne de Football a tenté en vain de convaincre Hannibal Mejbri et Ismael Gharbi ainsi que Bilel Sahli de participer à la Coupe du Monde U20. Ces joueurs, respectivement liés à Birmingham City au Paris Saint-Germain et au SSC Napoli , n’ont pas été libérés par leurs clubs. Cette absence de planification pour une compétition d’envergure tel que la Coupe du Monde est un échec manifeste. Il est évident que le nouveau sélectionneur de la Tunisie U20 s’est basé sur les performances lors de la Coupe d’Afrique pour constituer sa liste avec l’inclusion de Zinedine Sassi et Baraket Hmidi afin d’apporter du sang neuf. Une préparation planifiée aurait permis de développer des automatismes au sein de l’équipe. Il est regrettable que la FTF n’ait pas organisé un stage à l’étranger pour offrir un environnement plus propice à la préparation du mondial. Les conditions dans lesquelles la Tunisie U20 a entamé sa préparation étaient clairement loin d’être optimales.

Approche tactique trop frileuse

Nous relevons des incohérences tactiques dans la liste finale ainsi que dans l’utilisation des joueurs pendant le tournoi. Le principal reproche adressé à Montassar Louhichi concerne le manque de diversification des profils dans sa liste. Tout au long du tournoi, le staff technique a persisté à aligner des joueurs à des postes qui ne sont pas leur spécialité. Par exemple, Abed, un défenseur axial de formation, s’est retrouvé à jouer en tant que latéral, ce qui a souvent posé des problèmes. Pourtant, l’équipe disposait d’un arrière gauche de métier, Rayan Nasraoui, qui avait brillé lors de la dernière Coupe d’Afrique. Cette obstination à ne pas aligner les joueurs à leurs postes de prédilection reflète une frilosité tactique de la part du staff technique. Le jeu excessivement défensif et insipide proposé par l’équipe n’a pas su créer de schémas de jeu préférentiels, rendant le jeu de la sélection terne et prévisible. Durant toute la compétition, Montassar Louhichi a opté pour un bloc bas et une première ligne défensive composée de cinq défenseurs, ce qui a entraîné un entre-jeu dégarni. En conséquence, les joueurs Derbali et Chouchane se sont souvent retrouvés en infériorité numérique, dépassés dans l’engagement physique, tout particulièrement face à la sélection irakienne où ils furent dépossédés du ballon de bout en bout. De plus, nous avons également constaté les mêmes contradictions dans l’utilisation des joueurs dans le secteur offensif. Enfin, nous nous sommes passés des services d’un 9 de métier et avons opté pour du bloc bas. Nous avons eu du mal à jouer sur la largeur du terrain et nous avons abusé du jeu long alors que nous n’avons pas les profils pour gagner des duels aériens.

Absence d’animation offensive

Il est indéniable que la qualification historique en huitièmes de finale obtenue par les troupes de Montassar Louhichi constitue un exploit, mais il est toutefois évident que les performances des Aiglons restent timides. En effet, le style de jeu proposé par l’équipe nationale manquait d’une philosophie claire et de schémas de jeu préférentiels. L’animation offensive était inerte, révélant un cruel manque d’automatismes entre les joueurs du secteur offensif. Le premier match de l’équipe contre l’Angleterre illustre parfaitement cette frilosité tactique et l’adoption du système 5-3-2 prôné par Louhichi, qui consistait à renforcer la défense en incorporant cinq défenseurs et en repositionnant un milieu de terrain défensif, Ghaith Ouahabi, en défense centrale. Cette approche de jeu se traduisait par un milieu de terrain dégarni, souvent en infériorité numérique et constamment dépouillé du ballon face à des équipes adverses qui disposaient d’au moins trois joueurs dans l’entrejeu. Ce scénario s’est répété tout au long de la compétition. Le constat concernant l’animation offensive est assez alarmant, car nous avons observé une attaque inactive où les éléments constitutifs de l’équipe semblaient cruellement manquer d’automatismes. Cela se manifestait par des difficultés à sortir proprement le ballon depuis la défense. Les défenseurs recouraient à des longs ballons pour sauter les lignes, mais ces passes ne trouvaient pas de destinataires face à des adversaires qui étaient athlétiquement compétitifs, tels que l’Angleterre et l’Uruguay. Ce qui laissait peu de chances aux joueurs du secteur offensif de se mettre en évidence. Le choix des joueurs n’était pas adéquat et l’utilisation du ballon dans la construction du jeu était problématique. Nous avions du mal à trouver une supériorité numérique et éprouvions des difficultés à relancer le ballon depuis nos bases arrières. En conclusion, l’équipe manquait de cohérence tactique et d’une bonne liaison entre ses différentes lignes.

Révélations et déceptions

Les déceptions :

  • Karim El Abed : Le stoppeur de Karlsruher U19 est passé à côté de son tournoi. Constamment pris de vitesse et dépassé dans son dos. Son manque de mobilité et de bagage technique l’a empêché de participer à l’animation offensive, ce qui a déséquilibré le jeu de l’équipe nationale en favorisant l’aile droite. Sa reconversion dans ce poste a limité son potentiel. La responsabilité incombe ainsi essentiellement au staff technique .
  • Ghaith Ouahabi : Le capitaine tunisien n’a pas su répondre présent et n’a donc pas rempli sa fonction. Il a montré des signes de fébrilité, comme en atteste ce pénalty concédé face à l’Uruguay. Bien qu’il ait alterné entre de bonnes et mauvaises relances, il a manqué de tranchant et d’autorité dans ses interventions défensives. Son tournoi a été marqué par un sens tactique défaillant comme l’illustre son placement approximatif où il se retrouve dépassé dans ses duels. En somme, le défenseur de l’Espérance Sportive de Tunis, Ghaith Ouahabi, a délivré une copie relativement moyenne en dépit de ses qualités ; combattif sur le terrain et leadership dans le vestiaire.
  • Béchir Yacoub : Pour ses débuts avec la Tunisie, le pensionnaire de l’académie de l’AS Monaco n’a pas réussi à reproduire les performances proposées avec le club du Rocher. Faisant preuve de déchets techniques et bousculé dans ses duels, l’attaquant tunisien est apparu brouillon et non inspiré lors de ses rares incursions offensives sur son côté gauche. Laissant une impression mitigée pour son premier tournoi international avec la sélection tunisienne. Toutefois, il convient de noter que ce manque d’automatisme avec ses partenaires en attaque s’explique par un faible nombres de matchs de préparation qui est la résultante d’une intégration opérée à la hâte par le staff technique.

Les révélations :

  • Dries Arfaoui : Le gardien du club belge de Deinze a été la grande révélation des Aiglons lors de ce mondial en Argentine. Le portier a grandement pris part à la qualification de la Tunisie en 1/8e de finale, grâce notamment à une performance de haute volée réalisée face à l’Irak, où il fut infranchissable ce qui a maintenu l’équipe tunisienne et a permis d’empocher la victoire 3-0. Auteur par la même occasion d’un clean sheet, le tournoi de Dries Arfaoui fut marqué par une assurance dans les cages grâce à une lecture du jeu aboutie et une maitrise de ses émotions qui a pleinement rassuré sa défense au fil de la compétition.
  • Ali Saoudi : Formé au Stade Tunisien, l’axial à livré de bonnes performances en Coupe du Monde avec la Tunisie s’inscrivant dans la continuité de ce qu’il a réalisé durant la CAN U20 en Egypte. Le défenseur d’1m90 à été une véritable tour de contrôle au sein de la charnière des Aiglons, se montrant intraitable dans sa zone. Solide dans ses appuis et faisant preuve d’un marquage individuelle indéfectible. Il fut un véritable poison pour les attaquants adverses, harcelant constamment le porteur du ballon et remportant ainsi de nombreux duels grâce a une bonne lecture du jeu et un sens du placement développé. Ses qualités athlétiques viennent compléter le tout. Il s’est érigé en rempart défensif de premier plan en couvrant les espaces et les brèches notamment dans le couloir gauche occupée par Karim Abed, prouvant dans ce sens sa capacité d’adaptation à des situations de jeu imprévues. Ne se laissant pas intimidé par ses adversaires, il fit preuve d’une force de caractère. Néanmoins il a commis une erreur de communication avec sa défense qui a valu à la Tunisie de concéder un penalty face au Brésil en 1/8e de finale.
  • Mahmoud Ghorbel : Le joueur du Club Sportif Sfaxien, a démontré une énergie impressionnante. Il s’est battu sur chaque ballon et a constamment offert des solutions en attaque. Il a été récompensé par deux fois, en obtenant un penalty qu’il a transformé contre l’Irak, ainsi qu’en marquant un but dans les arrêts de jeu contre la sélection brésilienne. Son dépassement de fonction a été sa caractéristique la plus marquante, revigorant le collectif lors du match contre l’Irak.

Conclusion

En conclusion, la participation de la Tunisie à la Coupe du Monde U20 a été une expérience acceptable, malgré des résultats décevants. Il est essentiel de tirer les leçons de cette compétition et de travailler sur les aspects collectifs pour améliorer les performances futures. Le football tunisien possède un potentiel prometteur, et il est du devoir et du ressort des instances sportives et des acteurs impliqués de nourrir cette passion et de soutenir la progression des jeunes footballeurs vers l’excellence.

Safsaf

Passionné par le football tunisien, mes équipes favorites sont l'Espérance Sportive de Tunis et l'Espérance Sportive de Zarzis. J'ai découvert Tunisie-Foot en 2010, la référence du Football Tunisien depuis 1998 !

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